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UN GAGNON, MIRACULE DE SAINTE ANNE, à Beaupré



Le fait suivant a été raconté par l’auteur lui-même miraculé de sainte Anne, le fils de Pierre. Il raconte le fait quelques années plus tard alors qu’il est devenu prêtre, le troisième canadien à devenir prêtre.

        “J’ai été malade, dit l’abbé Pierre-Paul, du flux de sang à l’âge de quinze ans et demi en 1664, et ce fut en la semaine sainte que ce mal me prit; on se servit de tout ce que l’on put s’aviser pour me guérir mais inutilement jusqu’à
ce que par votre sollicitation Monsieur... (il s’agit de M. Morel qui rédigea ce récit sous sa dictée, en 1687), j’allai faire une neuvaine à Sainte-Anne, d’où je revins en meilleure santé et ne tardai pas à être entièrement guéri du mal que j’avais depuis trois mois; mais environ la mi-novembre suivant, pour ne m’être pas conservé et avoir pris des choses tout à fait contraires à ce mal, je retombai et fus réduit à une telle extrémité, à la fin de l’hiver, que ceux qui me voyaient
disaient que je mourrais au printemps et ce, nonobstant les bons soins qu’on avait de moi; néanmoins au printemps, la vigueur me revint un peu en sorte que, l’été étant venu, j’eus la force d’aller recommencer une autre neuvaine à la susdite église de Sainte-Anne. Quoique je fusse extrêmement travaillé par le mal qui ne m’avait pas quitté, et que pendant toute la neuvaine je ne reçus aucun soulagement et qu’au contraire le dernier jour je fus extraordinairement malade, je fis une confession générale et mis toute ma confiance au pouvoir de la glorieuse Sainte Anne, parce qu’auparavant j’avais cru que les remèdes naturels ne pouvaient donner du soulagement. Dieu, ce semble, me voulut faire expérimenter par le redoublement de mon mal. À la fin de la neuvaine j’entendis la sainte Messe et je communiai; Plusieurs personnes ayant assisté, et deux petits frères, que j’avais, prièrent pour moi. Je ne sentis depuis cette heure-là aucune atteinte de ce mal et fus parfaitement guéri et recommençai mes études que j’avais été obligé de quitter. Je redis ceci 19 ans après la chose arrivée. Voilà, Monsieur, à peu près les choses telles comme elles se sont passées et comme je les crois devant Dieu, et pour l’honneur de sainte Anne.”


Notes sur ce même Pierre-Paul Gagnon. Il fut l’un des premiers élèves au petit séminaire de Québec. Il fut ordonné prêtre le 21 décembre 1677. Tout d’abord missionnaire sur la Côte Nord, puis desservant à Charlesbourg en 1684, il vint ensuite exercer son ministère à Sainte-Anne de Beaupré. Il devint secrétaire de Mgr de Saint-Vallier en 1686 puis, quelque temps après, premier curé résident de la Baie-Saint-Paul où il demeura jusqu’en 1702, et desservant de la Petite-Rivière-Saint-François, dont il fit construire l’église, à ses frais, avec la part de son héritage. L’abbé Pierre-Paul se noya à 61 ans et 7 mois, soit le 6 avril 1711. Il fut inhumé le 16 mai suivant dans la chapelle de Sainte-Anne-de-Beaupré.