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COMMENT NOS MERES FABRIQUAIENT LEURS SAVONS



Voici une bonne recette pour faire ce que l’on appelle "savon du pays".

20 livres de matières grasses
4 livres de résine
4 livres de résine caustique.

Chez nous on obtenait la lessive avec les cendres du bois de
chauffage sur lesquelles on mettait de l’eau; après quelques
jours, c’était devenu ce qu’on appelait caustique.
4 chaudiérées d’eau de 20 livres chacune.
2 à 3 livres de gros sel.
 

Façon de procéder:

Mettre l’eau dans un chaudron de fer (c'était le grand chaudron de fer installé dehors dans la cour), Faire chauffer cette eau; ajouter les matières grasses (ces matières grasses, c’était des restes de viande ou de suif d’un animal abattu). Faire bouillir jusqu'à ce que le mélange fasse des fils en soulevant la palette, puis ajouter lentement du sel (environ 2 livres). En mettant le sel, le mélange caille, alors brasser lentement et parfaitement et laisser bouillir. La lessive vient alors sur la surface et fait des petites bulles granulées; ajouter encore peu peu quelques poignées de sel, brasser et laisser cuire jusqu'à ce que la lessive se répande claire sur toute la surface du savon;   il est alors cuit à point. Retirer immédiatement du feu et laisser refroidir. Le savon monte à la surface et une quantité de potasse repose au fond du chaudron.

        Le savon doré, bien refroidi est taillé ensuite sur une planche en morceaux selon nos préférences. On le laisse durcir aux rayons du soleil. On utilisait la potasse (résidu au fond du chaudron) pour laver les planchers de bois mou. Mais attention aux mains et aux enfants car c’est un liquide très fort.

AINSI FAISAIENT NOS MÈRES CANADIENNES

        La dernière fois que j’ai vu fabriquer ce savon du pays, c‘était chez ma soeur Ida à Central Falls, dans cette même maison tout près de l’église, où elle vécut pas moins de 50 ans. J’étais allée prendre des vacances chez elle alors que son mari venait de décéder. C’était en février 1973. Un jour, elle me descendit à la cave pour me montrer sa brassée de savon du pays. Merveille, en petit dans un chaudron plus petit, elle avait réussi les plus beaux savons dorés. Pour
elle, c’était la joie du retour au passé car bien sûr, ce ne lui était plus une urgence.

        Chère Ida, comme elle nous a aimés! la joie de nous recevoir chez elle. Pour ma part, je lui dois une bonne “chandelle” puisqu’elle s'ingénia à payer mon pensionnat durant mes études. Elle était ma marraine et elle s’en rappelait. Peu après ce voyage dont je viens de parler elle nous quittait pour de bon, c’était le 16 décembre 1973. Nous nous reverrons un jour avec nos bien-aimés parents, frères et autres soeurs.