Celui-ci va habiter une terre au troisième rang de St-Jean Port Joli. Sur cette terre, il y avait une sucrerie. Elle était garnie de “cassôts” (terme pour chaudière), de futailles (grand contenant) et avait un gros chaudron. L’usage des sucreries était déjà populaire à cette époque. Les époux ont passé l’hiver 1794 chez les parents d’Augustin Carrier. Lors de ce mariage, les grands parents Joseph Durand et Marie-Joseph Pelletier étaient absents. Les transports en hiver n’étaient pas facile.
        En cette même journée, Charles-François Gagnon et Marie-Reine Caron firent la donation de leurs biens à leur fils Charles. Ils préparèrent ainsi leurs vieux jours. Charles-François était alors âgé de 45 ans. Dans la lignée des Gagnon, il est celui qui l'a fait le plus jeune. Leur fils Charles reçut la terre du deuxième rang de St-Jean Port Joli avec les bâtiments dessus en plus de la part d'héritage de Charles-François suite au décès de Marie-Anne Miville. Les rentes seigneuriales devront dorénavant être payées par Charles. En retour Charles-François et Marie-Reine se réservèrent plusieurs privilèges dont une pension dans la maison. Pour se nourrir, ils exigèrent que Charles livre chaque année dans leur grenier 26 minots de blé froment réduit en farine, 24 minots de bons pois pour leur soupe, 200 livres de lard gras, un quartier de boeuf ou un mouton, un minot de sel et une demi-livre de poivre, 15 livres de tabac filé, 4 livres en poudre, des oignons, 50 choux, 6 pots d'huile à brûler, 25 livres de morues sèches ou saumons et anguilles et 2 "coubles" de chapons gras. Ils voulurent aussi 12 oeufs par semaine tant que les poules pondront. Dans la cuisine, ils voulaient une place sans cochonnerie.
                Pour se vêtir, Charles-François Gagnon et Marie-Reine Caron exigèrent de Charles qu'il leur fournisse du linge. Ils ont estimé la durée de chaque pièce de vêtement et demandèrent que ces pièces soient renouvelées après une certaine période. Charles-François demanda à avoir 3 paires de souliers d'Europe avec une nouvelle paire à tous les 3 ans, une paire de bas et de chausson en laine du pays par année, une bougrine doublée faite avec les fournitures en étoffes du pays à tous les 2 ans, une paire de culotte et mitasses en étoffe du pays tous les ans, un gilet au besoin, un bonnet drapé à tous les 2 ans, un chapeau à tous les 4 ans, un fichu de soie à tous les 4 ans, 2 chemises par année, un habillement en étoffe du pays au besoin pour les dimanches, fêtes et sorties. Marie-Reine Caron demanda une jupe en petite étoffe, 2 coiffes et un mouchoir de coton chaque année, un mouchoir de mousseline à tous les 3 ans, une paire de gants chamois tous les 2 ans et un jupon et mantelet au besoin.
                Charles-François avait une sucrerie. Il pourrait être le premier de nos ancêtres à produire du sucre d'érable. Il se réserva l'usage de la sucrerie aussi longtemps qu'il pourrait le faire. Lorsqu'il n'aura plus la capacité, il exigera que son fils Charles lui fournissent 25 livres de sucre d'érable par année.
        Concernant les sucreries ou érablières, Charles-François Gagnon avait aussi la sienne. Dans l’inventaire de 1788 qui fut fait suite au décès de sa première épouse Marianne Miville, on retrouve comme article des vaisseaux de sucrerie”. Ce terme signifie les chaudières qui étaient placées aux érables. Est-ce que le terme vaisseau” pour désigner une chaudière était largement répandu? Ce terme était encore utilisé à Tingwick beaucoup plus tard. Il semble que Charles-François aimait faire les sucres.
        Leur fils Charles pourra leur donner des travaux selon leur force. Charles-François se réserva comme travail de faire de la terre neuve sur un arpent et demi en superficie.
        Après leur décès, ils voulurent que leur fils les enterrent. Ils devront se faire dire un service avec leur corps présent et avoir chacun 25 messes basses pour le repos de leur âme.
Il y eut aussi le partage des biens de Charles-François Gagnon à ses enfants. Cet acte fait suite au décès de sa première épouse Marianne Miville. Ce partage se fit en présence de son beau frère Joseph Miville, subrogétuteur, de son frère François Gagnon, de son beau-père Louis Caron et de Charles Karouak. Le partage de ses biens consistait à séparer sa terre en 6 morceaux pour la donner à ses 6 enfants vivants. La terre concernée est celle que Charles- François avait obtenu en 1783 en plus d’une parcelle de terre qu’il avait au troisième rang de St-Jean Port Joli. Cette parcelle touchait à sa terre principale du deuxième rang.
        Le partage se fit par la même méthode employée par les générations précédentes. On fit 6 billets avec le nom de chacun des enfants. On les roula et on les plaça dans un bonnet où ils furent bien brouillés. On appela un petit enfant pour faire le tirage au sort. Cet enfant devait être la plus jeune de la famille soit Félicité. Elle avait alors 11 ans. Les billets tirés furent dans l’ordre ceux de François, Marthe, Victoire, Charles, Félicité et Joseph. La terre fut séparée en 6 parties en allant du sud-ouest vers le nord-est.
        Cependant un partage de ce genre devait plus tard créer des ^problèmes. Charles Gagnon était le donataire de son père par conséquent celui qui était appelé à devenir le principal propriétaire de cette terre. Il devait acheter plus tard chacune des parts de ses frères et sœurs. Au départ, il était seulement propriétaire du sixième de sa terre. Charles Gagnon s’est ainsi retrouvé avec une énorme dette. Cela l’a peut être amené à la situation économique difficile qu’il aura à vivre avec la vente d’une partie de sa terre en 1818.
        A partir de 1794, Charles-François ne s'occupa plus de la gestion de la ferme. Toutes les affaires furent dirigées par son fils Charles. A cause de cela, il n'apparaît presque plus sur les documents après cette date. Il continua d'être cultivateur avec son fils jusqu'à sa mort.
        Le 17 juin 1818, son fils Charles dut vendre une partie de son